Grande auditrice de podcasts de faits divers, je suis révoltée par la manière dont cette émission traite les féminicides. Ces meurtres sont encore trop souvent présentés comme des “crimes passionnels”, une expression archaïque et trompeuse, qui laisse croire que l’amour ou une émotion incontrôlable guide le geste. Or, il ne s’agit pas d’amour, mais de pouvoir, de contrôle, et de volonté de possession sur les femmes.
Dans de très nombreux cas, on apprend que la victime avait tenté de fuir la relation, de se reconstruire ou d’entamer une nouvelle vie. Ce n’est donc pas une “perte de contrôle”, mais bien une réaction de domination brutale face à l’émancipation de la femme. La présenter comme “celle qui a brisé le cœur de son compagnon” ou “celle qui l’a quitté pour un autre” revient à justifier, voire à humaniser, l’acte du meurtrier.
On minimise aussi les violences antérieures : quand la victime a alerté, le récit donne largement la parole aux proches de l’agresseur pour les contredire : « on n’a jamais vu de bleus », « il n’était pas violent », comme si cela prouvait quoi que ce soit. Pourtant, les violences sont souvent invisibles, psychologiques, et s’exercent à huis clos. Ce choix éditorial contribue à décrédibiliser la parole des victimes et à entretenir les stéréotypes dangereux autour des violences conjugales.
Autre biais récurrent : on insiste sur le passé difficile de l’auteur (enfance compliquée, chômage, isolement…) sans jamais interroger son rapport aux femmes, à la masculinité, ni au sentiment de possession. Quand il s’agit de jeunes hommes, on met tout sur le dos des jeux vidéo ou des « mauvaises fréquentations », là encore pour éviter de nommer les causes structurelles : sexisme, culture du viol, banalisation des violences.
Avec une telle audience, cette émission aurait l’occasion de faire œuvre de pédagogie, de nommer les choses, de briser les tabous. À la place, elle recycle des clichés d’un autre temps, au détriment des victimes et de la compréhension d’un fléau qui tue une femme tous les deux à trois jours en France. À l’heure où les chiffres sont alarmants, ce traitement sensationnaliste et désinformé est non seulement navrant, il est dangereux.